Jeunghae Yim
Elle pratique la vidéo. Le numérique lui paraît si léger, presque immatériel. Et il se trouve qu’elle a du goût pour l’immatériel.
Elle travaille sur ce que l’on voit quand on ne voit pas. Son travail de médiatrice avec les aveugles l’a conduite à éprouver cette expérience particulière : ce que l’on voit quand on ne voit pas.
Quelle est la beauté invisible ? Et alors l’espace mental recherché devient plutôt fantastique, incroyable, inconcevable.
Elle préfère la narration fragmentée, la coexistence, la coïncidence intime entre le documentaire et la fiction.
Les films d’Alain Cavalier, Ben Rivers (avec ses étranges personnages et communautés), le duo Teresa Hubbard et Alexander Birchler (la mémoire, l’espace, le temps narratif, de façon assez surréelle) la touchent beaucoup.
Elle privilégie une manière de narration molle, souple, douce, dissocie et désamorce les narrations linéaires. Toute intention trop prononcée la gêne. Une façon de dire que ce qui se voit bien ne s’énonce pas clairement.
Elle regarde, prélève, agence.
« Les Flâneurs et Playtime – La créativité et l’anthropologie de tous les jours », voilà le titre de son mémoire.
Dans Dreamdata Paris il s’agit des prostitués à Belleville et des vendeurs à la sauvette. Dans Depuis le lointain, le naufrage d’un bateau avec cinq cents lycéens (Tant qu’il n’y a pas de corps il n’y pas de mort). Dans Somewhere Not Here, à Dubaï elle interroge les ouvriers derrière les jolies façades.
Ses personnages, prostituées de Belleville ou vendeurs à la sauvette devant le Louvre, on les reconnaît, mais on ne les connaît pas. Ils sont visibles invisibles. Comme les aveugles, des êtres humains que l’on voit sans voir.
Plus que tout Jeunghae Yim aime ne pas figer sa pensée, assurant que, pour elle, l’incertitude des choses est une valeur ultime.
Née en 1987.
Vit et travaille à Paris.
jeunghae.yim@gmail.com